Moe and Trevor

Maurice

Dartmouth NS
Canada

Dix ans de mariage et cinq ans de rémission

Si j'avais croisé quelqu'un d'autre qui s'occupe d'un proche touché par un cancer, je lui aurais demandé : « Quels sont vos trucs pour rester positif ? Votre proche est-il lui aussi entêté ? » Il aurait été bon de discuter avec cette personne pour obtenir des éclaircissements et des points de vue différents
Maurice, proche aidant de son mari atteint d’un lymphome

Mon mari Trevor et moi étions à un brunch de la fête des Mères avec sa mère en 2019 lorsqu’il m’a jeté un regard inquiet après avoir tâté la bosse sur son cou. J’ai secoué discrètement la tête pour lui dire « pas maintenant ». Plus tard dans la journée, il m’a dit que la bosse grossissait. Il m’a avoué aussi qu’au cours des six semaines précédentes, il avait consulté son médecin de famille et un oncologue, et avait subi des analyses sanguines et une biopsie, dont les résultats étaient rentrés.

J’étais avec Trevor lorsqu’il a reçu son diagnostic de lymphome diffus à grandes cellules B (LDGCB). Lorsqu’il a entendu le mot cancer, il s’est pour ainsi dire éteint, et c’est moi qui ai poursuivi la conversation avec le médecin, en tentant de le faire participer lui aussi. 

Nous avions tous les deux 44 ans et étions mariés depuis cinq ans à l’époque.

L’annonce du diagnostic à notre famille et à nos amis a été difficile, mais nous l’avons faite ensemble. Au téléphone, Trevor prenait la parole le premier, puis j’enchaînais avec la « partie scientifique » sur le lymphome. Pendant notre expérience du cancer du sang, Trevor et moi avons fait le point régulièrement sur son état de santé et ses traitements dans un groupe de discussion Facebook destiné à la famille immédiate et aux amis proches.

Le récit de Trevor était parfois décousu, surtout au début; il se souvenait parfois plus ou moins de ce que les médecins ou les infirmières lui disaient à cause du choc initial et du stress que lui avait causés le diagnostic. J’ai pensé que, s’il allait seul à ses rendez-vous, je n’obtiendrais jamais une vue d’ensemble de son état. Je l’ai donc accompagné à tous ses rendez-vous, même à ses séances de chimiothérapie.

Je suis une personne pragmatique et organisée. J’étais capable de faire abstraction de mes émotions et de gérer la situation pour lui. J’avais toujours cette impression que je ne pouvais pas lui imposer en plus mes émotions. Je me suis mis en veille, et je me suis occupé de tout. Avant de commencer le travail, je prenais un moment dans le stationnement. Il m’arrivait aussi de confier mes émotions à ma supérieure. 

En rétrospective, je constate que le plus difficile a été de ne pas en avoir su assez – et assez tôt – sur l’expérience du cancer du sang. Une infirmière nous a bien remis un document sur la Société de leucémie et de lymphome du Canada, mais sans vraiment nous en parler. J’aurais aimé qu’on nous oriente vers la SLLC plus vite. Ça m’a contrarié d’apprendre que nous aurions pu avoir accès à plus de ressources au moment du diagnostic.

Nous nous répétions que cette maladie n’était pas incurable et que nous allions nous en sortir ensemble. Nous avons appris rapidement que le LDGCB était un cancer du sang guérissable. Après la chimiothérapie, Trevor a subi une radiothérapie; les traitements ont réussi.

Avec le sourire, j’ai continué de pousser Trevor à faire des choses qu’il ne pensait pas pouvoir faire. Et lui m’a soutenu en me faisant confiance pour prendre soin de lui. 

L’an dernier, j’ai suivi une formation pour devenir bénévole dans le cadre du programme de soutien aux proches Premier contact de la SLLC afin d’être jumelé avec des proches comme moi. Trevor a suivi plus tard une formation de bénévole pour être jumelé à des personnes ayant reçu un diagnostic de cancer du sang. 

Nous venons de célébrer notre dixième anniversaire de mariage et nous sommes sur le point d’atteindre la marque des cinq ans de rémission de Trevor, qui sera alors considéré comme officiellement guéri.

Les épreuves nous ont rapprochés. Notre expérience du cancer du sang a été difficile, mais je prenais soin de l’homme que j’aime, ce qui fait que pour moi, c’était tout de même tolérable.